Porteur d'eau
Les porteurs d’eau, qui vont et viennent avec leurs seaux des fontaines et rivières aux maisons qu’ils approvisionnent, font partie de ces commerces ambulants et petits métiers de la rue. Au nombre des fameux "cris de Paris", ils font vivre tant bien que mal ceux qui s’y vouent. À l’eau !
Les porteurs d’eau sur la place de ParisAu XVIIIème siècle, on compte sur Paris environ 20 000 porteurs d’eau, frères des charbonniers. Les Auvergnats s’en sont fait une spécialité ou du moins un privilège. On recense trois sortes de porteurs : ceux dont le tonneau est traîné par un cheval, ceux qui tirent le tonneau monté sur deux roues et enfin les porteurs à sangle.
Les porteurs d’eau vont chercher cette eau si indispensable à la vie de tous les jours à la fontaine publique. Aussi, ces fontaines sont-elles régulièrement encombrées par une trentaine de porteurs qui en font le siège et se querellent avec des servantes et des bourgeois. Ou encore dans la Seine, mais uniquement en amont de la place Maubert, "à peine de punition corporelle" et de faire emprisonner les contrevenants.
Chaque porteur a un numéro d’ordre délivré par la police et paie à la ville un droit par hectolitre. Il est sommé d’avoir ses tonneaux pleins la nuit et de seconder les pompiers en cas d’incendie. Comme pour tout autre commerce, il doit acheter sa clientèle. Son importance est fonction du nombre et de la position sociale de ses clients. Le porteur pratique l’abonnement, la voie d’eau, qui coûte 2 sous jusqu’au second étage et 3 à tous les autres. Robustes, joviaux, expansifs dans le privé, mais âpres au gain dans les affaires, ils sont infatigables et peuvent monter leurs deux seaux remplis à ras bord jusqu’au septième étage d’une maison, trente fois dans la journée.
Un approvisionnement difficileCette eau puisée et transportée sans la moindre hygiène est des plus dangereuses pour la santé des Parisiens. Cette situation ne peut pas durer. Le 23 décembre 1768, des "voitures d’eau clarifiée" font leur apparition, conduites par des porteurs d’eau en uniforme bleu à boutons jaunes, arborant sur leur bonnet une plaque aux armes du roi et de la ville ; ils vont distribuer dans les quartiers chics, aux seuls abonnés, la voie d’eau de 36 pintes qui est vendue 2 sols. Bien entendu, il ne s’agit que d’un palliatif.
À la veille de la Révolution, on se plaint de la cherté de l’eau à Paris et l’on jalouse les Londoniens, alimentés par des pompes à eau.
Il faudra attendre encore des années pour que la capitale soit entièrement alimentée en eau potable.
Extrait du chapitre concerné, dans l’ouvrage Les métiers d’autrefois, de Marie-Odile Mergnac, Claire Lanaspre, Baptiste Bertrand et Max Déjean, Archives et Culture.