Pêcheur en pêcheries fixes
Les hommes vivant sur le rivage ont toujours tiré leur subsistance de la mer. Probablement limitée au départ à une cueillette des coquil-lages et à la capture des poissons pris dans les flaques d’eau à marée des-cendante, cette pêche s’est ensuite dotée de véritables pièges à poissons.
Une origine incertaineC’est sans doute de l’observation des poissons pris dans les flaques d’eau à marée descendante qu’est née l’idée d’élever des barrières pour constituer de véritables pièges à poissons : les pêcheries permanentes. Certaines sont vraisemblablement millénaires et leurs premières mentions remontent au Moyen ge. Elles ont globalement la forme d’un triangle : une large ouverture vers l’amont et deux bras de pierre ou de branchages forment les côtés adjacents de la pointe tournée vers le large. Elles fonctionnent comme de gigantesques pièges à poissons utilisant le moteur naturel de la marée.
Les bras de pierre du pêcheurLes pêcheries en pierre sont construites dans les lieux où la mer détruirait les pêcheries en bois. Des pieux peuvent être enfoncés pour renforcer les assises. Elles ont soit une forme circulaire soit d’un seul angle dont les extrémités sont tournées se dirigent vers le rivage. Chaque bras peut atteindre jusqu’à 200 mètres. Ils sont composés de deux rangées de blocs appareillées à l’intérieur desquelles sont jetées pêle-mêle des pierres de tailles moins importantes. Il n’y a ni chaux ni mortier afin que l’eau puisse s’écouler. Selon le décret de 1853 réglementant les pêches côtières maritimes, chacune d’elle s’ouvre vers le large par un goulet d’une largeur de 1,30 mètre et d’une longueur maximale de 1 mètre.
La grille fermant le goulet doit être placée à mi-distance. Dans la région de Granville, cette grille, ou écluse, constitue le seuil de la pêcherie composée du seuil proprement dit, de deux montants et d’une voûte. La voûte est percée de manière à pouvoir laisser entrer la porte de l’écluse dont la mise en place et le maintien sont facilités par les rainures creusées dans les montants. Cet ensemble en pierre peut être renforcé par une entretoise placée entre les montants sous la voûte. Une auge posée à côté du seuil complète l’ensemble.
La récolte, droit dans la hotteLorsque la marée descend, le pêcheur, une hotte sur le dos, un haveneau à la main, le filet tubulaire avec son cadre de bois sur l’épaule, rejoint le seuil soit par l’extérieur soit par l’un des bras dont le sommet est garni de pierres plus ou moins plates. Il enlève le panneau de l’écluse, place le filet. Lorsqu’il est plein, l’homme relève le filet avec une gaffe, enlève la cordelette, vide le contenu dans l’auge et remplit sa hotte. La marée est presque terminée. Le pêcheur prend son haveneau pour attraper les bouquets avant de ramasser les poissons échoués sur le sable, les crustacés réfugiés dans la base des bras.
Le travail achevé, il ne lui reste plus qu’à enlever le filet, fermer la porte de l’écluse. Il rentre chez lui où sa femme prend le relais pour vendre aux alentours le produit de sa pêche.
Extrait du chapitre concerné, dans l’ouvrage Mers et Marins en France d’Autrefois, Archives et Culture.