Réparateur de filet
Pour les pêcheurs, le filet est un instrument capital dont la qualité de fabrication et d’entretien détermine l’efficacité. Ce n’est pas tout de savoir manœuvrer le bateau et tirer les filets : il faut aussi savoir réparer et apprêter avec soin cet outil plus fragile qu’on ne le pense.
Un travail domestiqueS’il existe bien, dans certains villages côtiers, des gens qui font profession de ravauder les filets (et encore, souvent s’agit-il d’un travail d’appoint, qui vient s’ajouter à une autre activité), la plupart du temps cette tâche est exécutée par le marin lui-même lorsqu’il est à terre, ou par sa femme, ou encore par le mousse du bateau de pêche.
Qu’il soit fait par l’un ou par l’autre, ce travail exige des compétences et des connaissances spécifiques : il ne s’improvise pas, réclame un apprentissage, nécessite des instruments précis, prend de nombreuses heures, et peut donc être considéré comme un métier à part entière. Bien souvent, celui qui sait réparer les filets sait aussi les fabriquer. Un travail long et complexe, qui prend déjà des heures pour un petit filet (senne ou tramail, rectangulaires), et ne cesse de s’allonger au fil de l’agrandissement des surfaces des filets, avec le développement du chalutage. La fabrication de ces immenses filets de plusieurs dizaines de mètres de long devient, à la fin du XIXème siècle, du domaine de la manufacture et non plus de l’artisanat…
Les outils nécessairesIl faut une navette pour tirer le fil ; elle est en bois souple et poli (du buis ou du frêne, souvent), ou plus rarement en os ou en cuivre poli. Elle a 15 à 25 cm de long, 1 à 2 cm de large ; pour les mailles vraiment très fines, on utilise de petites navettes en métal.
Les mailles se forment sur un "moule", c’est-à-dire un tube lisse (en bois, en cuivre...) autour duquel on enroule le fil. Le nœud se fait au-dessus du cylindre. Ainsi, les mailles ont toutes le même diamètre et sont bien calibrées.
Quant aux fils, ils sont faits, jusqu’au début du XXème siècle, essentiellement de chanvre roui ; puis ils sont remplacés par des fils synthétiques, imputrescibles mais plus glissants et plus difficiles à nouer.
Leur diamètre varie du très fin filament à la tresse câblée de plomb, qui sert surtout à faire le haut et les côtés du filet.
Il est fréquent que, pendant la pêche, le filet s’accroche sur des fonds rocheux qui en déchirent plusieurs mailles. Mais il ne suffit pas de les vider du poisson pour les réparer ! Si les pêcheurs partant très longtemps en haute mer, comme les terre-neuvas, font après chaque pêche des réparations grossières à bord, la vraie réparation se fait à terre.
Extrait du chapitre concerné, dans l’ouvrage Mers et Marins en France d’Autrefois, Archives et Culture.